Publié le 16/03/2007
La journée en images : http://www.lnr.fr
Elle pose des plots pour les exercices à venir… Il impose une séance de gainage aux minots qui n'attendent que de toucher le cuir… Elle regarde ses fiches pour que tout soit parfait au lancement des ateliers… Il lance les attaques de ses ouailles qui filent au large marquer un essai salvateur… Elle a apprit à aimer ce sport vers lequel elle est venue tardivement après avoir pratiqué le judo… A 45 ans, il a toujours été un amoureux du ballon ovale et s'est rapidement tourné vers la formation à 18 ans… Marguerite est au RC Strasbourg… Claude est à Haguenau… Tous les deux sont éducateurs et mettent en avant les valeurs de ce sport et tentent de les faire partager par les enfants.
« Le but est de les amener à prendre du plaisir et à se responsabiliser, d'abord vis-à-vis d'eux même, et de l'équipe ensuite car c'est un sport collectif ou chacun à sa place, petits, grands, moyens, timides pas timides » souligne l'éducatrice strasbourgeoise. Une idée relayée par son collègue haguenauvien : « Il faut les amuser et leur permettre de prendre du plaisir à travers une multitude d'exercices ludiques afin qu'ils se motivent et évoluent dans ce sport. » Mais cette évolution passe tout de même par le travail comme le rappelle Jérôme Cazalbou : « il y a avant tout ce plaisir du jeu à développer, mais pour prendre du plaisir, les jeunes doivent maîtriser les bases de notre sport. Et ces bases on les obtient par du travail au niveau de la technique individuelle, pour savoir faire une passe, un plaquage, se situer sur un terrain. Et c'est pour cela qu'il faut bouffer des exercices ».
« Il faut être patient »
Les Ambassadeurs, éducateurs d'un jour à Strasbourg savent de quoi l'ancien demi de mêlée toulousain veut parler à l'image de Frédéric Cermeno, arrière ou ailier au Castres Olympique : « Je dois beaucoup de choses à mes éducateurs car ce sont eux qui m'ont permis d'arriver là où je suis aujourd'hui par une éducation un peu sévère du rugby. Ils ont cru en moi et m'ont fais beaucoup bosser pour que je progresse. Ils me faisaient venir une heure avant les entraînements et je repartais une heure après. » Tirer les enfants vers le haut est certes l'objectif de ces éducateurs, mais il ne faut en aucun cas brûler les étapes. « Il faut être patient », précise Jérôme Cazalbou, « tous les enfants ne se construisent pas de la même manière. Il faut s'adapter à eux, et ce n'est pas toujours simple. »
Marguerite acquiesce et avoue même que cet état d'esprit réserve quelques fois de belles surprises. « A l'école de rugby, les gamins ont la possibilité de prendre leur temps et d'évoluer, et quand il est prêt, il est prêt. Le plus grand plaisir, c'est de voir un enfant qui n'apparaissait pas totalement investi, qui avait la tête en l'air, qui cueillait des pâquerettes ou qui n'allait pas au contact, se révéler au cours d'un tournoi en marquant des essai, en plaquant… Je prends toujours le temps de les laisser mûrir pour qu'ils soient bien dans leurs têtes et dans leurs crampons ». Et pour Tim Bowker, le centre australien d'Albi, né en Afrique du Sud, qui a vécu cela chez les Boks, c'est le plus important. « Le principal n'est pas de gagner, mais de participer. Il faut que les jeunes aient l'esprit libre et prennent du plaisir sur le terrain. C'est ce que mes éducateurs m'avaient inculqué, et aujourd'hui tous doivent avoir ça en tête ».
La théorie est simple à appréhender pour donner du plaisir à tous ces enfants, mais dans la pratique c'est beaucoup plus complexe. « C'est un gros boulot », martèle Denis Cech, le centre de Montauban, « Il faut être à l'écoute, il faut être attentionné, sans cesse à l'affût. C'est fait de plaisir et d'envie de voir les enfants s'amuser, mais c'est vraiment un travail énorme ». Ce que soutien Claude devant ses minots d'Haguenau : « Il y a beaucoup de travail, il faut avoir un maximum d'exercice à disposition pour ne pas les installer dans la routine, d'autant plus en fonction de l'âge. Il faut qu'on nous explique les objectifs et les finalités, car ce n'est pas notre profession, nous faisons cela par passion, mais il nous faut un accompagnement ».
« Pas de différence entre le Gers et l'Alsace ! »
Et à Strasbourg, comme dans toutes les villes visitées par les Ambassadeurs, où le rugby n'est pas le sport roi, les difficultés sont encore plus grandes, et le travail des éducateurs doit être encore plus important. « C'est énorme ce qu'ils font ici » avoue Grégory Menkarska, pilier du Stade Toulousain, admiratif devant ces hommes et ces femmes. « Il faut savoir qu'ils organisent et qu'ils payent le ramassage des gamins par les cars pour qu'ils puissent venir jouer au rugby. Et sur place ils les prennent en charge sur les ateliers. Moi qui vient d'une terre de rugby, je ne vois pas de différence entre le Gers et l'Alsace aujourd'hui, c'est dire la passion qu'ils y mettent ».
Mais s'ils s'investissent tant dans ce sport, c'est que celui-ci leur a apporté beaucoup comme l'explique Claude : « Je me sers des valeurs que mes éducateurs m'ont inculqué. Les notions de collectifs, de copain, on joue pour le copain, on offre sa balle. C'est le ciment de ce sport, il est en nous et nous essayons de le transmettre ». Un état d'esprit que Jérôme Cazalbou met également en avant. « On se revoit quelques années en arrière, avec des culottes courtes, des chaussettes qui montaient bien au dessus du genou et des ballons plus gros que notre tête. Les éducateurs nous apprenaient ces valeurs, c'est comme cela que l'on a avancé, et c'est à nous aujourd'hui de le dire et de le transmettre aux enfants ».
En ce mercredi 14 mars 2007, nos Ambassadeurs ont revêtu l'habit d'éducateur, et tous sont ravis, Grégory Menkarska en tête : « C'était le moyen de m'échapper car je ne vis pas la meilleure année de ma carrière. Je n'avais pas touché un ballon depuis un mois, et là j'ai couru avec eux. Bon je suis cuit (rires), mais c'est vraiment un plaisir, car je revis ce que j'ai connu. Il y en a qui ont 20 cm de plus, d'autre qui ont 10 kg de moins, mais il n'y font pas attention. Ils sont très enthousiastes, et si ici ça permet de promouvoir le rugby, pour nous, ça nous permet de ne pas oublier les valeurs du rugby ». Ces mêmes valeurs que Christophe Berdos, l'arbitre de l'étape met également en exergue à son niveau : « les éducateurs ont un rôle très important qui se retrouve à la fois sur le terrain et dans les mentalités, de par le jeu et les valeurs. Ils doivent faire passer le message de notre sport qui est le respect, du jeu, mais aussi de l'adversaire et de l'arbitre ».
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